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Briser le plafond d’âge : les jeunes dans l’Avant-projet de constitution 2025

by admin

Amb. Roudy Stanley PENN
Politologue/ Auteur

La query de la participation des jeunes à la vie politique et institutionnelle fait partie des sujets qui suscitent de nombreux débats dans notre société. Le 7 juin dernier, en présence de plus de trois cents jeunes, j’ai eu l’event de présenter une conférence en ligne pour Kaw Académie sur la place des jeunes dans l’Avant-projet de Structure 2025. C’est, à mon sens, un thème qui mérite davantage d’écho.

En 2014, alors que je dirigeais encore une construction de jeunesse dont la mission principale était la promotion de la participation politique des jeunes, ma place était claire – et elle n’a pas changé depuis. Longtemps relégués à la périphérie des décisions politiques, les jeunes doivent, à mon sens, voir leur engagement reconnu et valorisé. Présents à chaque tournant historique, leur contribution ne peut plus être ignorée.

Dans cette perspective, au-delà des critiques que l’on peut adresser à ce projet de réforme constitutionnelle, il faut reconnaître qu’il suscite un débat vital dans la société : celui de la place des jeunes dans les espaces de pouvoir.

L’objectif de cette analyse est de mettre en lumière les avancées contenues dans l’Avant-projet de Structure de 2025 en matière de reconnaissance et de participation des jeunes, en les comparant aux inclinations de la Structure de 1987. Le texte est assorti également de quelques propositions de reformulation pour certains articles.

La reconnaissance constitutionnelle de la jeunesse

Le préambule de l’Avant-projet proclame notamment que la Structure est faite « pour assurer la participation efficient des jeunes dans les prises de décisions engageant l’avenir de la Nation ». Ce qui fait que, d’entrée de jeu, l’Avant-projet prend place et reconnait de manière très explicite la nécessité de la participation des jeunes qu’elle consacre. Pourtant, la Structure de 1987, si elle aborde des sujets importants pour les jeunes comme l’éducation, ne contient pas d’articles spécifiquement dédiés à la promotion de leur participation dans la vie politique ou les prises de décision, comme le fait l’avant-projet. En son article 17, la structure de 1987 établit que les Haïtiens âgés de dix-huit (18) ans accomplis peuvent exercer leurs droits civils et politiques s’ils remplissent les autres situations prévues. Ce n’est là qu’une disposition générale sur la citoyenneté et la majorité, qui s’applique à tous les citoyens, y compris aux jeunes adultes, mais pas un accent particulier sur leur participation en tant que groupe spécifique de la société.

La participation politique des jeunes : entre principe et mécanismes

Près de 70 % de la inhabitants haïtienne a moins de 30 ans. Les jeunes constituent donc, et nul besoin de lentilles pour le constater, le véritable poumon de notre société. Leur participation ne peut plus rester soumise à des rapports de pressure ou à des revendications ponctuelles : elle doit être institutionnalisée. Il est grand temps d’en finir avec ce cycle où chaque génération doit reprendre les mêmes luttes, comme si chaque avancée obtenue n’était gravée que dans un pacte informel, constamment remis en query. Il serait bien plus ingénieux d’envisager une cohabitation harmonieuse, où les générations s’assument comme des relais successifs, engagés ensemble dans un même projet nationwide.

Reconnaître et garantir la participation des jeunes repose sur trois fondements essentiels[1] :

  • Économique : c’est affirmer que les jeunes doivent pleinement contribuer au développement économique du pays, non pas en marge, mais au cœur des stratégies nationales.
  • Sociopolitique : c’est adhérer à l’idée qu’en tant qu’acteurs à half entière, ils doivent participer activement à la vie publique et aux processus de décision.
  • Socioculturel : c’est valoriser leur rôle au sein des constructions sociales existantes et favoriser le dialogue intergénérationnel, indispensable à l’évolution des establishments et à la stabilité sociale.

Les partis politiques dans le mécanisme de participation des jeunes

Si les partis politiques constituent le principal espace où se fait l’motion politique de manière institutionnelle, alors tout effort ou toute volonté réelle de transformation démocratique doit nécessairement passer par eux. C’est donc une initiative intéressante de lire dans l’article 30-1 de l’Avant-projet que : « Tout parti politique doit encourager la participation des femmes et des jeunes dans ses constructions. » Le seul bémol toutefois, c’est que l’utilization du verbe « encourager » laisse une marge d’interprétation trop massive. Non seulement les partis, pourraient se limiter à des discours symboliques, mais la plupart peuvent se contenter de ne rien faire. Le mieux serait, à mon avis, une formulation plus contraignante, telle que :

« Les partis politiques sont tenus de garantir une représentation minimale des jeunes dans leurs cases dirigeantes. »

Les situations d’éligibilité : abaissement des seuils d’âge

Les avancées les plus visibles – et sans doute les plus audacieuses – de l’Avant-projet de Structure de 2025 en matière de jeunesse concernent la révision des seuils d’âge pour l’exercice de certaines fonctions. Là où la Structure de 1987 est demeurée résolument conservatrice, l’Avant-projet semble, à bien des égards, vouloir opérer un virage stratégique, sinon une véritable campagne de séduction à l’endroit des jeunes. Le tableau ci-dessous donne une idée des changements dans le seuil d’âge.

 

Structure 1987 Avant-projet structure 2025 Différence
Président : 35 ans Président : 30 ans 5 ans
Premier Ministre : 30 ans Premier Ministre, Ministres et Secrétaires d’État : 25 ans 5 ans
Sénateur : 30 ans. Sénateur : 25 ans 5 ans
Député : 25 ans Députés : 21 ans 4 ans
CSCCA : 35 ans CSCCA : 30 ans 5 ans
CEP : 40 ans CEP : 30 ans 10 ans
Conseil Constitutionnel : 40 ans Conseil Constitutionnel : 30 ans 10 ans
Maires : 25 ans Maire de la commune : 21 ans 4 ans
Conseil municipal : 25 ans Assemblée Municipale : 21 ans 25 ans
——— Gouverneur départemental : 25 ans n/a
——— Membre du conseil de l’ULCC : 30 ans n/a

 

Depuis 2010, ma place sur la query n’a pas changé : la participation politique des jeunes doit être encouragée de manière institutionnelle. À travers Jeunesse Montante – une construction que je co-dirigeais aux côtés de jeunes professionnels tels que Karl Peterson Sainéant, Natacha Clergé, Yvenel Detournel, Guibens Dérilus, entre autres, et dont la relève a été assurée par Jean Rony Alexandre – nous nous sommes activement engagés en faveur de la promotion de la participation politique des jeunes. Mais cet engagement s’est aussi traduit de manière intellectuelle lorsqu’en 2013, j’ai publié un pamphlet sans équivoque, dans lequel je démontrais que la Structure de 1987 est à la fois gérontocratique et constitue un frein à l’engagement citoyen des jeunes.[2]

Dans ce texte, je me suis armé de braveness pour dénoncer la marginalisation politique des jeunes comme une forme de discrimination, voire une violation des droits humains, en soulignant notamment l’incohérence manifeste entre l’âge légal de la majorité (18 ans) et les seuils d’âge requis pour exercer différentes responsabilités publiques, en m’appuyant sur des exemples internationaux de jeunes élus, ainsi que sur les luttes historiques des mouvements pour les droits civiques et l’égalité – notamment aux États-Unis – pour démontrer que la compétence, l’engagement et la imaginative and prescient doivent primer sur l’âge si l’on veut réellement renouveler la démocratie haïtienne.

Il s’agit donc pour moi, d’une avancée intéressante qui vise à faire des jeunes, de véritables acteurs de leur avenir dans la société.

Parallèlement, je reconnais que certains – sans que je ne cite ici de noms – demeurent très sceptiques face à cette proposition, arguant que les jeunes sont davantage attirés par des activités ludiques et qu’ils sont aujourd’hui les porte-étendards de nombreuses dérives qui affectent notre société. Je ne dirai pas que ces inquiétudes sont entièrement infondées, surtout face à l’insouciance apparente de bon nombre de jeunes qui, s’ils accédaient à des postes de décision, pourraient effectivement inquiéter. Néanmoins, à ces critiques, j’apporte deux arguments :

  1. D’abord, si dérive il y a, les jeunes n’en sont pas les seuls responsables. Au contraire, ils en sont souvent les premières victimes. Ce sont les dysfonctionnements de la société dans son ensemble qui produisent ces comportements, et les jeunes n’en sont que le reflet, non la trigger première.
  2. Ensuite – et surtout – l’abaissement de l’âge d’éligibilité ne signifie pas que les fonctions en query seront automatiquement occupées par des personnes ayant atteint l’âge requis. Il s’agit d’un seuil minimal, ouvrant simplement la possibilité à tout jeune qui remplit les situations de compétence et de légitimité de se présenter. Le suffrage populaire reste souverain, et c’est aux électeurs de décider. Ceci étant dit, si on ne craint pas le management des jeunes – qui a d’ailleurs été prouvé et éprouvé tout le lengthy de l’histoire d’Haïti – alors il ne devrait y avoir aucune objection à ce que cet abaissement soit considéré.

Il n’en demeure pas moins que je reste convaincu du droit légitime de chaque citoyen d’exprimer ses réserves quant à toute disposition contenue dans cet avant-projet. D’autant que moi, j’ai mes propres réserves également. C’est le cas en partie, en ce qui concerne les questions de jeunesse, des articles 72 et 76.1 de l’Avant-projet.

Les limites des articles 72 et 76.1 de l’avant-projet

En effet, si j’admets que l’Avant-projet est, à certains égards, progressiste en matière de participation politique des jeunes, il faut tout de même reconnaitre que certaines inclinations, notamment les articles 72 et 76.1, présentent des faiblesses notables. Ces articles stipulent : « la loi électorale encourage la candidature des jeunes et des femmes ». Une formulation à mon sens peu significative. Il s’agit de « inclinations indicatives », qui orientent sans contraindre. Or, ce dont les jeunes ont besoin aujourd’hui, ce n’est pas d’un easy « encouragement » à se porter candidats, mais de mécanismes clairs et contraignants garantissant leur représentation efficient. Cela passe notamment par l’instauration de scrutins appropriés – comme le scrutin proportionnel – et par l’adoption de quotas obligatoires sur les listes électorales.

Il est donc impératif de ne pas se contenter de formulations vagues et non engageantes. Pour que les aspirations affichées de l’Avant-projet se traduisent en réalités concrètes, les articles en query doivent être reformulés de manière à instaurer des obligations précises et vérifiables pour les partis politiques.

Voici, par exemple, une proposition de reformulation :

« La loi électorale garantit la représentation équitable des jeunes et des femmes à la Chambre des Députés. Dans le cadre du scrutin proportionnel, chaque parti politique est tenu de présenter, sur ses listes de candidature, au minimal 30 % de femmes et 10 % de jeunes de moins de 30 ans. Les listes doivent être structurées de manière à assurer l’éligibilité efficient de ces groupes. Le non-respect de cette disposition entraîne l’irrecevabilité de la liste. »

Conclusion : la jeunesse, cette pressure éparpillée qu’il faut rassembler

Dans une lettre adressée au journaliste Georges Petit, Jacques Roumain écrivait : « Jeunes, vous êtes éparpillés, cela ne doit pas être. Grouppez-vous ! » Aujourd’hui plus que jamais, il est temps que les jeunes fassent entendre leur voix et, une fois pour toutes, cessent de se laisser instrumentaliser, pour enfin s’imposer comme de véritables acteurs. L’histoire d’Haïti nous enseigne que la jeunesse a toujours été au cœur des grands bouleversements sociopolitiques. Reconnaître les jeunes, ce n’est pas seulement leur consacrer quelques articles dans une Structure ; c’est leur permettre d’agir, de décider et de contribuer activement à la building nationale. Automobile l’avenir d’Haïti repose sur sa capacité à forger un véritable pacte intergénérationnel, fondé sur la confiance, la compétence et l’engagement commun.

[1] Seek for Frequent Floor. (2014). Principes directeurs pour la participation des jeunes à la consolidation de la paix. https://documents.sfcg.org/wp-content/uploads/2014/04/Guiding-Principles_FR.pdf

[2] Roudy Stanley Penn. (2013). Plaidoyer pour l’Abaissement de l’Age de l’Éligibilité et de Nomination aux Postes Politiques, Jeunesse Montante. Lien de session : https://www.academia.edu/108636311/Pour_labaissement_de_lÂge_de_lÉligiBIlitÉ_et_de_nomination_aux_postes_politiques_PLAIDOYER

A lire aussi:

L’organisation Diaspora Ayisyen Pou Lapè suggest une difficulty constitutionnelle pour sortir Haïti de la crise



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